Archives des actualités - Avril 2000  

Découverte du proto-amas de galaxies le plus éloigné jamais observé :
de nouvelles prédictions


Évolution d'un réseau de cordes cosmiques
 

Les défauts topologiques cosmiques représentent un lien entre la physique des particules, la cosmologie, et des phénomènes usuels en physique de la matière condensée. Ils permettent de proposer des explications quant à la physique de l'Univers très primordial par des analogies avec des systèmes étudiés en laboratoire. En fait, si les idées actuelles basées sur des extensions du modèle standard des particules (dont le succès n'est plus à rappeler) sont correctes, alors les défauts en sont une conséquence inévitable et, de plus, possèdent des propriétés intéressantes au niveau astrophysique qui ont motivé les tentatives d'explications, tant du problème de la formation des grandes structures que de celui des fluctuations du rayonnement fossile.

Parmi ces défauts topologiques, les cordes cosmiques sont les plus étudiées. Il convient de noter que nous ne parlons pas ici des cordes fondamentales, que certaines théories proposent comme entités de base de la matière pour remplacer les particules. Les cordes cosmiques seraient des objets célestes à part entière, restant à découvrir, se présentant sous la forme de lignes très fines de matière primordiale (matière qui n'existerait plus ailleurs), contenant une énergie invraisemblable et évoluant dans l'Univers à des vitesses proches de celle de la lumière, imprimant une courbure à l'espace lors de leurs déplacements. Ces cordes disparaissent rapidement dans les premiers temps cosmiques, mais quelques unes, qui sont observables, survivent dans l'Univers . De part leur existence, elles laisseraient cependant une signature particulière sur le rayonnement de fond micro-onde émis quand l'Univers avait environ 300.000 ans. Du fait de leurs propriétés gravitationnelles un peu spéciales, elle peuvent, en particulier, accréter la matière les environnant et former les structures à grande échelle (c'est-à-dire la répartition dans l'espace des galaxies) que nous observons aujourd'hui. Elles courbent aussi les trajectoires des rayons lumineux, comme le font les galaxies et quasars. Par ailleurs, comme on l'a dit, elles sont susceptibles de perturber le fond de rayonnement micro-onde, aussi bien à l'époque du découplage de la radiation d'avec la matière, quelques dizaines de milliers d'années après le Big-Bang, que depuis cette période, sur le trajet effectué par ces photons fossiles pour parvenir jusqu'à nous. Leurs mouvements rapides produisent aussi une structure très compliquée de boucles, dont la désintégration aurait pu remplir l'Univers d'un fond de rayonnement "gravitationnel", qui sera peut-être détectable dans

Exemple de réseau de cordes cosmiques après un long temps d'évolution : on constate la présence d'un très grand nombre de boucles dont la désintégration est le problème qui nous préoccupe ici. (Simulation numérique faite par D. Bennett et F. Bouchet, Institut d'Astrophysique de Paris).

Pour ne pas provoquer de catastrophe cosmologique, ces boucles ont dû massivement disparaître, et comme on vient de le dire, l'hypothèse généralement admise est qu'elles se transforment principalement en ondes gravitationnelles (non détectées pour l'instant). Or une équipe de théoriciens français vient de constater que toute la cosmologie qui découle de ces réseaux de cordes est complètement changée si on imagine d'autres produits de désintégration, tels que des photons par exemple ..., à tel point qu'il va être indispensable dorénavant de tout ré-examiner. Dans un article récent (disponible ici, pour les spécialistes), cet effet a été analysé et les résultats sont résumés sur le schéma ci-dessous sur lequel on voit les prédictions d'un modèle de cordes cosmiques comparées aux observations. La différence peut atteindre un facteur multiplicatif d'environ 50 !

Fluctuations attendues dans le cas d'un modèle de cordes cosmiques en fonction de l'échelle angulaire sur laquelle se fait l'observation du rayonnement cosmique micro-onde. Les points observationnels sont indiqués avec leur marge d'incertitudes. Les courbes de différentes couleurs représentent les prédictions du modèle basé sur les cordes cosmiques lorsqu'on suppose que les boucles disparaissent de façons variées : par exemple, la courbe rouge correspond au modèle ancien suivant lequel seules des ondes gravitationnelles étaient émises. Comme on le voit, cette courbe est très éloignée des observations, raison pour laquelle la communauté cosmologique considérait que les fluctuations du rayonnement cosmique n'avaient certainement pas été produites par des défauts topologiques. Cet argument ne tient visiblement plus dès lors qu'on considère la courbe violette qui se situe bien au-dessus des autres, maintenant à un niveau comparable à celui des observations. Dans ce cas, le produit de désintégration des boucles le plus important est le rayonnement lumineux. Des cas intermédiaires sont aussi indiqués, qui ne dépendent que du mode principal de désintégration. On constate que l'effet le plus important a lieu pour des échelles angulaires de l'ordre du degré (l=200 sur la figure), région sur laquelle les incertitudes sont encore trop importantes pour qu'il soit possible de conclure ; les observations futures (objectif majeur des missions satellites MAP et Planck) préciseront ces données et sont donc très attendues. (Résultats aimablement transmis par A. Riazuelo et N. Deruelle, Observatoire de Meudon, et P. Peter, Institut d'Astrophysique de Paris)
 
 


 
 
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