Cette planète extra-solaire est l'une des plus étudiées car, vue de la Terre,
elle passe devant son étoile tous les trois jours et demi. Pendant cette
mini-éclipse d'environ 3 heures, la planète cache une petite partie de
l'étoile qui apparaît ainsi légèrement moins brillante. Cette particularité
permet d'observer son atmosphère ; celle-ci imprime sa trace sur la lumière
qui la traverse, comme au crépuscule la lumière du Soleil traverse
l'atmosphère de la Terre qui ne laisse filtrer que la lumière rouge.
L'équipe composée de chercheurs de l'Institut d'Astrophysique de Paris (IAP),
de l'Université d'Arizona et de l'Observatoire de Genève, a observé trois
passages de la planète devant son étoile. Ces observations ont été réalisées
dans l'ultraviolet avec le Télescope spatial Hubble, au moyen du spectroscope
STIS installé en février 1997 par les astronautes de la Navette spatiale
Discovery. L'ultraviolet permet de capter la trace de l'hydrogène
dans la partie haute de l'atmosphère. En effet, l'hydrogène est l'élément le
plus abondant et le plus léger ; il s'élève facilement dans la haute
atmosphère. Ainsi, vue dans la raie de l'hydrogène dite "Lyman alpha" à
121,6 nm de longueur d'onde, l'ombre de la planète apparaît gigantesque.
"Nous avons eu l'énorme surprise de voir que l'atmosphère d'hydrogène de
cette planète s'étend jusqu'à plus de 200 000 kilomètres, si haut que la
planète semble trois fois plus grosse que prévue !" explique Alfred
Vidal-Madjar. Le gaz est observé bien au-delà de la zone d'influence
gravitationnelle de la planète ; on le voit s'échapper à plus de 100
kilomètres par seconde (soit 360 000 kilomètres à l'heure), poussé par le
rayonnement de l'étoile.
Ces observations ont demandé une analyse détaillée et un traitement
particulier afin de mettre en évidence la signature atmosphérique de
l'hydrogène. "Le plus difficile a été de corriger les effets thermiques du
détecteur et de soustraire l'émission de la haute atmosphère de la Terre qui
est, elle aussi, visible avec le Télescope spatial" explique Jean-Michel
Désert, ingénieur à l'Institut d'Astrophysique de Paris.
Un modèle simple permet d'expliquer cette observation. Cette forme de queue
cométaire avait été imaginée par J. Schneider dès 1998. Dans la haute
atmosphère, la température du gaz augmente sous l'effet de l'étoile proche. De
plus, l'attraction gravitationnelle de la planète est affaiblie par celle de
l'étoile qui exerce une force de marée similaire à l'action du Soleil et de la
Lune qui fait monter les océans sur Terre. "L'atmosphère est ainsi étirée",
décrit Alain Lecavelier des Etangs (IAP), "puis l'hydrogène est poussé par le
rayonnement de l'étoile et se disperse dans une queue étendue comme la queue
de gaz d'une comète". Il est possible d'évaluer la quantité de gaz qui
s'échappe de HD209458b : au minimum 10 000 tonnes d'hydrogène par seconde. Il
est même probable que le flot soit bien supérieur ; la planète pourrait ainsi
perdre une fraction significative de sa masse. Ce phénomène d'évaporation des
planètes trop proches de leur étoile permettrait ainsi d'expliquer le manque
de planètes qui tournent à moins de 7 millions de kilomètres de leur étoile :
ces planètes doivent s'évaporer très rapidement, ou devenir des planètes moins
massives et pauvres en hydrogène, comme Neptune, ou même ne plus montrer que
leur coeur solide mis à nu.
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