Cette Minispirale a été observée à l'aide d'un
spectro-imageur infrarouge, type d'instrument donnant une image du
champ à chaque longueur d'onde. Si cette longueur d'onde correspond
à la raie d'une espèce chimique on obtient ainsi la répartition de
cet atome dans le champ observé. En même temps, en chaque point du
champ (chaque pixel du détecteur) on accède au spectre de la source
présente à cette position. L'image présentée a été obtenue avec le
spectro-imageur surnommé BEAR sur le
Télescope
Canada-France-Hawaï, dans une seule raie, la raie Brackett gamma
de l'hydrogène ionisé à 2,16 µm, découpée en environ 500 plans.
Cette "haute résolution" permet de mettre en évidence les variations
locales de vitesse (effet Doppler) de l'hydrogène, constituant
majeur de la Minispirale, donc d'accéder à sa cinématique. La
question qui se posait lors de ces observations était de déterminer
la structure réelle de cette "spirale" apparente et, à partir de là,
son origine.
L'image présentée est issue de ces données à l'aide
d'un traitement tel que ses couleurs traduisent effectivement des
décalages vers le rouge ou vers le bleu. Le gaz en rouge s'éloigne
de l'observateur à une vitesse extrême de 350 km/s, tandis que les
régions en violet se rapprochent de nous à 350 km/s. Cette
correspondance couleur/vitesse est indiquée sur le spectre extrait
au pixel encadré en blanc et noir sur l'image. Sur ce spectre, on
voit nettement trois raies. Elles s'interprètent par la présence de
trois nuages de gaz superposés sur la ligne de visée ayant des
vitesses radiales différentes. La raie principale, à droite,
correspond à l'extrémité de la structure rouge et jaune, le Bras
Est (310 km/s). La raie la plus à gauche (environ -60 km/s)
correspond à la structure nommée Bras Nord, en vert bleu et
violet. La troisième composante, autour de 100 km/s, est une
nouvelle structure, que notre étude a permis de découvrir, le
Pont Est. Cette structure est visible sur la seconde image
ci-dessous en vert entre le Bras Est en jaune et rouge et le
Bras Nord en bleu et violet. L'échelle de vitesse
d'éloignement sur cette seconde image va de 0 km/s (en violet) à
200 km/s (en rouge).
Une décomposition de chaque spectre, pixel par pixel, en une
somme de raies simples, a permis de décomposer l'ensemble de la
Minispirale en neuf structures distinctes, dont plusieurs
identifiées pour la première fois, et d'extraire pour chacune la
carte correspondante de vitesse radiale. L'absorption partielle de
certaines de ces structures par d'autres a permis de les placer les
unes par rapport aux autres sur la ligne de visée. Un modèle
cinématique a été ajusté sur la carte de vitesse du Bras Nord,
donnant notamment accès à sa morphologie complète en trois
dimensions. Ces structures représentent la surface ionisée de nuages
de gaz entraînés dans le formidable champ gravitationnel du trou
noir central. Le centre de notre Galaxie offre la possibilité unique
d'étudier en détail l'interaction du trou noir, qui semble être
présent au centre de chaque galaxie, avec son environnement.
Cette analyse de la Minispirale est la plus fine et la
plus complète à ce jour. C'est en particulier la première fois que
des informations précises sur la vitesse et sur la structure
tridimensionnelle de l'objet deviennent accessibles. Une analyse
aussi fine n'a été possible que grâce à la haute résolution
spectrale (~20 km/s) et bonne résolution spatiale (~0,5 secondes
d'arc) de l'instrument BEAR. Cette étude fait partie du travail de
thèse de Thibaut Paumard, sous la direction du Dr. Jean-Pierre
Maillard, en collaboration avec le Pr. Mark Morris. Elle sera
publiée prochainement dans le journal européen
Astronomy & Astrophysics. |