Origine et évolution des galaxies
Evolution chimique et cinématique de la Voie Lactée
La Voie lactée constitue un champ privilégié pour les études de la physique et de l'évolution des galaxies. Par l'analyse détaillée de la composition chimique des différentes populations stellaires de son bulbe, son disque, et son halo, on peut contraindre les propriétés des étoiles qui ont progressivement enrichi le gaz en éléments chimiques plus lourds que l'hélium, et tenter de retracer l'histoire de la formation stellaire, ainsi que le taux d'accrétion du gaz baryonique dans le puits de potentiel gravitationnel du halo de matière sombre. En parallèle avec ces analyses « traditionnelles », les chercheurs de ce groupe ont commencé récemment l'étude du rôle des différents processus dynamiques, conduisant au "chauffage dynamique" du disque, et aux mouvements radiaux des étoiles et du gaz par interaction avec les inhomogénéités du champ gravitationnel. La nouvelle génération de modèles incluant le calcul paramétrisé de divers phénomènes dynamiques servira à l'interprétation des nouvelles observations, dont notamment celles attendues avec le satellite européen GAIA.
Chercheurs permanents : Nikos Prantzos
Milieu interstellaire et formation d'étoiles
Le milieu interstellaire est constitué de gaz (ionisé, atomique, ou moléculaire), de grains de poussière, et de rayons cosmiques. Il a une importance primordiale dans l'évolution des galaxies, car c'est par son effondrement gravitationnel que se forment les nouvelles étoiles, qui sont constamment en interaction avec lui : elles l'enrichissent en métaux, et le chauffent et l'excitent par leur rayonnement, leurs vents et leurs explosions en supernovae. Le gaz est également excité par l'énergie mécanique mise en jeu dans les interactions gravitationnelles, ou par un noyau actif de galaxie. Il se refroidit en produisant des signatures radiatives caractéristiques de son état physique.
Les chercheurs de ce groupe utilisent des traceurs variés du milieu interstellaire, observés depuis l'ultraviolet lointain jusqu'aux ondes radio centimétriques, afin de contraindre : les mécanismes d'évolution chimique des galaxies (en comparant les abondances chimiques des phases neutre et ionisée) ; les propriétés des poussières, et les effets du transfert radiatif (dans certains sursauts de formation d'étoiles, la quasi-totalité de l'énergie rayonnée est détectée dans l'infrarouge) ; les transferts d'énergie et de matière entre les différentes phases galactiques ; et l'activité de formation d'étoiles dans divers types de galaxies et d'environnements.
Chercheurs permanents : Michel Dennefeld, Daniel Kunth
Turbulence et régulation de la formation des galaxies
La formation des galaxies résulte de l’effondrement gravitationnel du gaz dans les halos de matière noire virialisés, c'est-à-dire ayant atteint un équilibre dynamique. Le gaz doit se refroidir pour se condenser et former de nouvelles étoiles, mais plusieurs facteurs s’y opposent. L’énergie gravitationnelle libérée par la formation des structures à grande échelle (paradigme actuel d’agglomération hiérarchique de la matière noire et visible), et l’énergie libérée par les processus de rétroaction des étoiles et des trous noirs (énergie mécanique et radiative) est transférée au milieu intergalactique et interstellaire environnant sous la forme de chaleur, de turbulence, et de rayons cosmiques. Comment cette injection d’énergie agit-elle sur l’efficacité de la formation stellaire ? Quelle est l’influence de l’environnement cosmologique sur cette efficacité? Des chercheurs de ce groupe travaillent sur ces questions au cœur de notre compréhension de la formation des galaxies. Pour cela, ils étudient en particulier des galaxies dans lesquelles la formation stellaire est supprimée, et où l’amplitude de la turbulence est beaucoup plus forte que dans notre Galaxie.
Ces travaux placent l’étude de la matière interstellaire, sa structuration et son évolution physico-chimique, dans un contexte élargi où les conditions physiques sont beaucoup plus extrêmes que dans la Voie Lactée, et jusqu’à maintenant non explorées dans les simulations de formation stellaire. Les observations et la modélisation physico-chimique du gaz et de la poussière interstellaire sont confrontées afin de découvrir et caractériser le gaz moléculaire qui n’est pas associé à de la formation stellaire. Ce gaz est présent dans des phases actives d’évolution telles que les interactions entre galaxies, les noyaux actifs, les vents galactiques, l'accrétion de gaz dans les halos des galaxies et les amas de galaxies, au cours desquelles une grande quantité d’énergie mécanique est libérée à l’échelle des galaxies. Caractériser l’injection de la turbulence dans le milieu interstellaire et dans le gaz accrété sur les halos est une piste pour expliquer pourquoi la formation des galaxies est un processus inefficace. Ces travaux révèlent le rôle central, mais encore peu compris, que la turbulence joue dans la formation des structures et l’évolution des galaxies.
Chercheurs permanents : Pierre Guillard
Galaxies à sursauts de formation d'étoiles
Les galaxies à sursauts sont fondamentales pour comprendre le mode de formation des étoiles et des galaxies, et l’enrichissement du milieu interstellaire en éléments lourds. Les galaxies locales servent en outre de laboratoires pour comprendre l’Univers lointain. Dans ce cadre, les galaxies dites « Wolf-Rayet » sont examinées afin d’élucider leur surnombre dans certaines galaxies déficientes en éléments lourds. La formation des étoiles massives dans les galaxies à sursauts s’accompagne d’une émission intense de photons de Lyman α, dont une grande partie est diffuse. Le travail des chercheurs du groupe porte sur la quantification des paramètres qui régulent cette émission dans les galaxies, et sert de pont aux recherches de galaxies à grand décalage spectral.
Chercheurs permanents : Hakim Atek, Daniel Kunth
Cinématique interne des galaxies et amas
Les galaxies baignent dans des halos de matière noire, dont les profils radiaux servent de test aux modèles de formation des galaxies et des structures. La méthode classique de modélisation de la masse, employant les mouvements des étoiles comme traceur du potentiel gravitationnel, souffre d'une dégénérescence entre les profils radiaux de masse et la forme des orbites. Des nouveaux algorithmes présentant l'état de l'art sont conçus et développés à l'IAP. Ils sont testés sur des galaxies simulées, puis appliqués aux dernières observations cinématiques des galaxies elliptiques et naines sphéroïdales.
Chercheur permanent : Gary Mamon
Etude panchromatique des amas de galaxies
L’observation couplée aux longueurs d’onde visibles, infrarouges et X des amas de galaxies permet de mieux comprendre non seulement leurs propriétés actuelles, mais aussi la manière dont ils ont pu évoluer en fonction du temps. Ainsi, en rayons X, les cartes de température du gaz très chaud renseignent les chercheurs sur les fusions d’amas récentes, tandis que les cartes de métallicité, couplées aux résultats de simulations numériques, leur permet de comprendre la manière dont le milieu intergalactique s’est enrichi en métaux. En optique, les fonctions de luminosité des galaxies fournissent des estimations des proportions de galaxies aux différentes masses. Et grâce à l’imagerie en infrarouge lointain, il est possible de voir comment les fusions d’amas peuvent dans certains cas augmenter le taux de formation d’étoiles dans les galaxies d’amas. Les chercheurs analysent par ailleurs les propriétés des groupes compacts de galaxies et leur mécanismes de formation au sein des simulations cosmologiques.
Chercheuse et chercheur permanents : Florence Durret, Gary Mamon
Ancêtres et descendantes des galaxies
La grande diversité des galaxies peut être décrite par un nombre réduit de classes, caractérisant leur forme, leur brillance, leur couleur : elliptique, lenticulaire, spirale, irrégulière, naines sphéroïdale. Ces propriétés sont le résultat de la croissance des galaxies par fusions entre elles, ainsi que par les accrétions de gaz durant le cheminement des galaxies dans les feuillets et filaments de la toile cosmique, et les éjections de gaz provenant des étoiles en fin d’évolution.
Afin de déchiffrer comment les galaxies se sont transformées au cours du temps, il faut pouvoir caractériser les différentes types de galaxies à des époques différentes de l'histoire de l'Univers. Cela nécessite l'analyse de grands relevés d'imagerie contenant des centaines de milliers de galaxies avec des logiciels sophistiqués, basés sur la modélisation des galaxies. L'exploration des espaces de paramètres se fait souvent par inférence bayésienne, ainsi que par apprentissage profond par réseaux de neurones. On peut alors mesurer, par exemple, l'évolution dans le temps de la proportion de galaxies de forte et faible masse pour chaque classe, et comprendre comment leurs interactions mutuelles et avec l'environnement intergalactique ont affecté leur formation d’étoiles.
Chercheuse et chercheur permanent : Valérie de Lapparent, Damien Le Borgne
Modèles d’évolution des galaxies
La modélisation des propriétés observées des galaxies est nécessaire pour comprendre leur formation et leur évolution. Deux codes publics et généralistes sont développés à l'IAP : Galaxev et Pégase. Combinant notre connaissance des modèles d'évolution stellaire et des propriétés spectrales des étoiles, ces codes permettent de calculer, pour différents types de galaxies, l'évolution de leur contenu en étoiles, gaz et poussière, et d'en déduire leur distribution spectrale d'énergie globale. Les étoiles sont formées selon une loi définie par l'utilisateur, et les populations stellaires et le milieu interstellaire évoluent de manière cohérente. Bien qu'ils soient basés sur le même principe d'un ajustement optimal des observations de galaxies proches, les deux modèles diffèrent sur plusieurs points comme l´émission du gaz ionisé, l'évolution de la métallicité, l'émission de la poussière ou des objets compacts en rayons X. Ces codes sont utilisés à l'IAP et dans le monde entier pour interpréter les simulations cosmologiques à N-corps et pour mesurer les paramètres physiques tels que la masse, la métallicité, l'âge, ou le décalage spectral des galaxies observées avec les grands télescopes. Par ailleurs, des modélisations analytiques de la formation des galaxies dans l'Univers local sont entreprises dans le groupe.
Chercheuse et chercheurs permanents : Michel Fioc, Damien Le Borgne, Gary Mamon, Brigitte Rocca-Volmerange
Galaxies à grand décalage spectral
L’étude des galaxies lointaines est une étape de choix pour notre compréhension des mécanismes de formation et d’évolution des galaxies. Le groupe se concentre sur l’étude des puissantes radiogalaxies lointaines qui permettent, d’une part, de tracer l'évolution des galaxies elliptiques massives dans un cadre cosmologique. D’autre part, la cartographie détaillée des noyaux de radiogalaxies à l’intérieur de 100 microsecondes d’arc est obtenue par des observations VLBI, et met en évidence des systèmes de trous noirs binaires. Ces travaux ont des conséquences importantes pour les futures observations du satellite astrométrique GAIA. Par ailleurs, grâce aux observations dans les domaines infrarouge et submillimétrique avec les satellites Spitzer et Herschel, et leur modélisation avec le code d’évolution Pégase, il est possible d’analyser l'interaction entre l’activité des noyaux de galaxies et la formation des étoiles, ainsi que de prédire le dénombrement des galaxies à grand décalage spectral. La raie de recombinaison Lyman α de l’Hydrogène est un outil cosmologique incontournable pour l’étude de ces objets lointains, permettant de caractériser les épisodes de formation stellaire, voire d’approcher l’époque de réionisation de l’Univers.
Chercheuse et chercheurs permanents : Hakim Atek, Daniel Kunth, Brigtte Rocca-Volmerange, Jacques Roland